L’année 2024 a été une année de contrastes saisissants, où les luttes des femmes se sont intensifiées, portant des voix de résistance puissantes mais où, simultanément, des forces de régression ont semblé vouloir engloutir tout ce qui a été durement acquis. Elle a été le théâtre de violences incessantes : les guerres qui dévastent les peuples et les espoirs et les droits qui régressent. Chaque jour, nous avons vu se profiler un recul démocratique inquiétant. En même temps, les femmes ont continué à mener des batailles, non seulement pour leurs droits mais pour ceux de toute humanité : elles ont incarné la résistance. Elles ont fait entendre leur voix, souvent au prix de leur sécurité, réclamant l’égalité, la liberté et la paix. Cette année nous a, encore une fois, révélé la grandeur de celles qui, par leurs combats, redéfinissent le sens de la liberté et de la dignité. Elle nous a aussi mises face à l’urgence de protéger les acquis démocratiques, de défendre la justice.
Pour le Fonds pour les Femmes en Méditerranée, elle a surtout marqué une étape symbolique dans son histoire : nous avons franchi le seuil des 1 000 subventions attribuées depuis notre création. Ce n’est pas juste un chiffre mais le reflet concret d’un engagement de long terme auprès des mouvements féministes de la région. Mille histoires de luttes, d’espoirs et de résistances dans les 21 pays du pourtour méditerranéen. Et nous avons mis en place les bases du premier changement de direction de la vie de la structure avec la formation, tout au long de l’année, de la nouvelle co-direction.
Nous avons poursuivi notre travail de mise en réseau en réunissant des actrices des mouvements féministes de Turquie et de la rive sud de la Méditerranée. Et, plus encore que les années précédentes, nous avons rendu visite à nos partenaires dans plusieurs pays : au Maroc, en Grèce, à Chypre, en France, en Espagne, en Algérie ou encore en Turquie. Ces rencontres sont essentielles pour ancrer notre action dans les réalités locales, pour écouter et construire ensemble.
C’est aussi l’urgence qui nous a poussées à intensifier nos efforts de plaidoyer auprès des bailleurs publics et privés afin de mobiliser plus de ressources pour les organisations de femmes, pour faire face à l’urgence de la situation dans laquelle se trouvent nos partenaires en Palestine et au Liban et, plus généralement, l’urgence devant les réductions des budgets alloués à l’égalité de genre.
Nous avons aussi innové : en adaptant notre formation féministe à l’intelligence collective aux besoins de militantes féministes croates de toutes générations, en facilitant la remise du Prix Susan Treadwell à 16 féministes européennes pour leur engagement sans faille et en envoyant six d’entre nous au grand Forum d’AWID, pour leur permettre de mieux appréhender la force du mouvement féministe international.
Autre sujet de fierté : l’ensemble de ces actionsa été mené avec un budget en augmentation de plus d’un tiers par rapport à l’année précédente ! Au-delà de ces chiffres et données, c’est une culture qui nous anime : celle d’un féminisme solidaire, ancré et inclusif. Et, cette année plus que jamais, nous affirmons avec conviction que le soutien aux mouvements féministes est une condition essentielle pour bâtir une Méditerranée plus unie, plus juste, plus libre et plus égalitaire.
Amina Izarouken, Caroline Brac de la Perrière, Marion Duquesne
Merci à Samia Allalou, Christelle Assaf, Fawzia Baba Aissa, Lamia Batata, Amy Elshaarawy et Noémie Friedli pour leur participation à la rédaction de ce rapport.